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- Matthieu Castagnos
- 7 novembre 2023
Interview de Jonathan Anguelov, Co-fondateur d’Aircall
Dans cet article vous retrouverez le témoignage passionnant de Jonathan Anguelov, co-fondateur d’Aircall. Durant cette interview nous revenons notamment sur son parcours, la genèse et le développement d’Aircall, son activité actuelle en tant que co-fondateur d’Anguesseau Capital ou encore la crise actuelle que traverse la French Tech.
Pouvez-vous vous présenter et revenir succinctement sur votre parcours scolaire et professionnel ?
Bonjour, je m’appelle Jonathan Anguelov, et je suis l’un des fondateurs d’Aircall, ainsi que d’Aguesseau Capital. J’ai obtenu mon diplôme de l’ESCP Business School en 2013. Mon parcours m’a mené rapidement de Londres, où j’ai travaillé comme courtier sur les marchés financiers pendant quelques mois jusqu’à la création de ma propre entreprise : Aircall.
Depuis sa fondation il y a une décennie, Aircall a connu un succès considérable, comptant désormais plus de 800 employés répartis dans le monde. L’entreprise a véritablement révolutionné le secteur de la téléphonie d’entreprise, apportant des innovations essentielles aux sociétés qui possèdent des centres d’appels internes, des équipes commerciales fortement axées sur les appels téléphoniques, ou encore des départements entièrement dédiés au service client.
Parallèlement à cette aventure entrepreneuriale, j’ai développé un intérêt marqué pour l’investissement immobilier, une passion qui a pris racine dès mon adolescence, à l’âge de 18 ans. Mes débuts dans la vie n’ont pas été faciles, et j’ai dû travailler dur pour subvenir à mes besoins dès mon plus jeune âge. À 17 ans, je vendais des pizzas, et dès 18 ans, j’ai enchaîné divers emplois étudiants. Grâce à ces emplois, j’ai réussi à économiser un peu d’argent, ce qui m’a permis de commencer à investir dans l’immobilier. Ces investissements immobiliers ont constitué ma principale source de revenus lors des premiers mois de l’aventure Aircall.
Pouvez-vous nous parler de l’évolution et de la genèse d’Aircall et votre activité actuelle Aguesseau Capital ?
Lorsque nous avons lancé Aircall en 2014, notre objectif était clair : révolutionner le monde de la téléphonie en entreprise en le simplifiant et en le rendant accessible à tous. À cette époque, le secteur de la téléphonie était en grande partie archaïque et nécessitait un souffle d’innovation. La création d’Aircall a été largement motivée par cette opportunité.
Au fil du temps, nous avons enchaîné les levées de fonds, cumulant finalement plus de 230 millions d’euros. Nous sommes entrés dans une phase d’hypercroissance, évoluant dans un secteur fortement concurrentiel.
Dix ans plus tard, je regarde avec une grande fierté ce que nous avons accompli. Personnellement, j’ai pris congé en septembre de l’année dernière, et je suis ravi de constater que l’entreprise continue de croître. Cela démontre que l’entreprise n’est pas dépendante de ma présence et qu’elle a atteint un degré élevé d’indépendance.
Aujourd’hui, je me consacre à 100% à Aguesseau Capital qui est une belle foncière avec beaucoup d’assets notamment des hôtels, des immeubles d’habitation, des immeubles de bureaux.
Selon vous, en tant que co-fondateur d’une entreprise devenue licorne et avec dix ans d’expérience, quelle est la valeur d’une idée lorsqu’on souhaite entreprendre ? Quels conseils donneriez-vous à jeunes qui souhaitent entreprendre ?
. Garder une idée secrète par peur qu’elle soit volée est une grave erreur. En ce qui concerne Aircall, nous avons rapidement reconnu la pertinence de l’idée, mais nous avons immédiatement cherché à approfondir notre compréhension du secteur et du marché. Le plus important est de lancer le projet, de travailler dur, et non simplement d’avoir l’idée.
Avant de créer Aircall, je n’avais aucune connaissance préalable en téléphonie. J’ai tout appris sur le terrain. Nous avons dû nous justifier à chaque étape de notre modèle d’entreprise. Les gens ne nous faisaient pas automatiquement confiance.
Je veux transmettre le message que dans la vie, oser est essentiel. En osant et en travaillant dur, on peut effleurer le succès du bout des doigts. Il n’y a pas de secret, la réussite exige beaucoup de travail sur une longue période.
Il est crucial de comprendre qu’il ne faut rien attendre, car la plupart du temps, les attentes déçues peuvent entraver notre efficacité. Il ne faut pas se laisser décourager, mais continuer à avancer vers ses objectifs, tout en restant humble pour écouter les avis et les critiques, afin de les transformer en forces.
L’écoute est une démarche passionnante et enrichissante. En tant que Business Angels, je suis régulièrement en contact avec des entrepreneurs. J’apprends beaucoup d’eux, et j’aime me positionner comme un auditeur, cherchant à comprendre les projets plutôt que de donner des leçons.
Est-ce un défi de maintenir son humilité et de rester ancré dans la réalité lorsqu’on devient co-fondateur d’une startup qui atteint le statut de licorne ?
En réalité, j’ai toujours préféré garder mes distances par rapport aux médias. Mon principal centre d’attention a toujours été Aircall et ma capacité à faire progresser l’entreprise. Je ne voulais pas m’exposer prématurément ni me mettre en avant avant qu’Aircall ne devienne une véritable success story.
Quel est votre opinion sur la crise actuelle que traverse la French Tech ?
Effectivement, la French Tech a traversé une période faste. Elle a connu des années incroyables, avec des financements quasi-illimités, où la principale préoccupation des fondateurs était le montant de leur dernière levée de fonds. C’était une course effrénée à la collecte de capitaux.
Aujourd’hui, la donne a changé. Il est devenu impératif d’être bien plus transparent quant au chiffre d’affaires et à l’Ebitda. Les employés doivent connaître les métriques financières de l’entreprise pour laquelle ils travaillent. C’est essentiel pour que les gens aient une compréhension globale de la santé financière de l’entreprise.
Cette nouvelle orientation imposée par la crise est, selon moi, une chose positive. Elle nous oblige à recentrer notre attention sur la « Bottom Line », c’est-à-dire la capacité des entreprises à générer des bénéfices. Bien sûr, il faut prendre en compte que l’innovation nécessite des investissements, et il est tout à fait normal que les entreprises innovantes enregistrent des pertes pendant plusieurs années.
Cela étant dit, cela ne devrait pas les empêcher d’avoir une vision claire à long terme de la profitabilité de leur activité. Malheureusement, pendant longtemps, de nombreux entrepreneurs manquaient de clarté sur ce point.
Pour terminer, Aguesseau Capital et Aircall recrutent-il des stagiaires ou des alternants ? Un mot pour convaincre nos lecteurs ?
En effet, nous offrons des opportunités de stage et d’alternance avec des missions assez diversifiées, couvrant un large éventail de domaines, de l’opération à la finance.
Par ailleurs, Aircall recrute en permanence, et je pense qu’il est judicieux, que vous soyez encore étudiant ou récemment diplômé, de considérer l’option de rejoindre une entreprise technologique pour y faire carrière.
Un grand merci à Jonathan Anguelov pour cette interview !