Interview de Bénédicte Perrot, CEO de Vidiamo Stroller
Rencontre avec Bénédicte Perrot, CEO de Vidiamo Stroller, avec sa poussette Limo, qui a su convaincre Eric Larchevêque, d’investir 250 000 euros, contre 25% du capital, dans QVEMA.
Bonjour Bénédicte, pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
Mon parcours est assez atypique. Mon père a été expatrié aux Etats Unis, donc j’ai eu l’énorme chance de pouvoir grandir là-bas. Rentrée ensuite en France seule pour faire mes études, j’ai obtenu un diplôme de l’école de commerce après bac l’ACI, une école qui faisait partie de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris.
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Vous avez travaillé chez Céline pendant 4 ans, à deux postes différents. Quels étaient vos missions dans chacun des deux métiers ? Qu’en avez-vous retenu ?
J’ai commencé chez Celine en stage de fin d’études dans le service de presse. Ce stage de 6 mois m’a permis de rentrer dans la prestigieuse maison grâce à mon niveau d’anglais et mon travail acharné et ma détermination. J’ai donc pu être embauchée en tant qu’Assistante Presse pour rapidement passer Responsable Evénements au bout de 2 ans. J’ai adoré mes années chez Celine car j’ai pu non seulement apprendre à organiser de très gros événements, mais surtout apprendre à travailler avec les équipes Celine du monde entier. Gérer les demandes et surtout les spécificités de chaque marché, travailler de près avec Michael Kors, et vivre des moments intenses à chaque nouvelle saison.
Vous avez passé 3 ans en responsable marketing. Qu’est-ce qui vous a marqué au sein de cette maison ? Quelles étaient vos responsabilités et accomplissements ?
Après plus de 4 années chez Celine à ne jamais compter mes heures et donner tout ce que je pouvais pour toujours réussir mon travail, j’ai eu l’opportunité de rejoindre la maison Ralph Lauren en tant que Responsable Marketing et Publicité pour la partie Ralph Lauren Home. Cette expérience allait me permettre d’étendre mes compétences marketing et de découvrir le monde d’une filiale après 4 années au sein d’un siège social. Cette expérience a été enrichissante mais très éprouvante au niveau humain.
En 2007, vous quittez Ralph Lauren pour Bonpoint, pour prendre le poste de responsable communication. En quoi vos précédentes expériences vous ont-elles servies dans cette expérience ?
J’ai donc cherché à changer pour retrouver une ambiance de travail plus sereine et plus en adéquation avec mon état d’esprit travailleur et surtout moins politique. J’ai toujours été très naturelle et directe, faisant en sorte d’être la meilleure dans tous les domaines. J’ai pu utiliser mes années d’expérience de grand groupe et entreprise internationale pour mettre en place une vraie stratégie de communication pour la maison Bonpoint.
Mon rôle chez Bonpoint était de structurer les relations presse, l’événementiel, la publicité et même le marketing direct afin de créer un département communication au sein de l’entreprise où jusqu’à mon arrivée, tout était dispatché auprès de divers services en interne.
Votre parcours montre plusieurs expériences dans le luxe. Avez-vous des tips pour réussir le process de recrutement ? Comment se préparer ?
Rentrer dans le secteur du luxe n’a pas été chose simple. Ne venant pas moi-même d’une grande école, c’est grâce à mon travail sans faille (ne jamais compter mes heures et chercher en permanence à faire plus que ce que l’on me demandait) et à mes compétences en coordination, langues, informatique et tout simplement à ma capacité à me débrouiller et à toujours trouver une solution à un problème, que j’ai pu être embauchée à la fin de mon stage.
Si j’ai des conseils à donner pour faire la différence, c’est en étant soi-même et surtout en montrant qu’on est passionné et prêt à travailler et surtout à apprendre. Ne jamais croire que l’on est meilleur que les autres.
En 2014, vous lancez Vidiamo Stroller, d’où vous-est-venue cette idée ?
L’envie de créer une poussette est arrivée à 2008, lors de mon premier congé maternité… je n’étais pas satisfaite de ma poussette et je trouvais que le marché manquait cruellement de produits pratiques et modulables. Mais créer une poussette seule? Impossible ! L’idée a donc muri pendant plusieurs années… jusqu’en novembre 2014 lors de mon congé maternité pour mon 3eme enfant (Amaury)… les trajets du quotidien avec 3 enfants étaient compliqués car ma fille de 3 ans ne voulait jamais marcher, mais l’accessoire planche à mettre à l’arrière de ma poussette était trop pénible à garder. Lors d’une nième crise de nerfs de ma fille Diane à 50 mètres de chez moi, je me suis demandé pourquoi je n’avais pas une petite place cachée sous ma poussette qui puisse sortir facilement quand j’en avais besoin, et à ranger facilement quand je n’en avais plus besoin ! Et voilà, l’idée unique de la Limo est née !
Quel est le concept précis de la poussette LIMO, qui a nécessité beaucoup de Recherche & Développement ?
Le concept de la Limo est d’avoir une poussette simple avec un châssis télescopique et un strapontin caché sous l’assise principale qui puisse être déployé facilement n’importe où et n’importe quand sans avoir à rajouter d’accessoire supplémentaire. Cette idée a dû être d’abord brevetée car c’était une réelle invention avant d’être développée selon les normes européennes et américaines des poussettes.
Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ? Comment les avez-vous surmontées ? Y’a-t-il un problème précis qui vous a marqué profondément ?
J’ai rencontré des difficultés à chaque étape du développement et de la commercialisation. J’ai dû d’abord trouver un bureau d’étude qui soit capable de développer un tel produit, ensuite trouver les fonds pour financer le développement, puis savoir changer de cap lorsque le bureau d’étude n’a pas su sortir un produit qui tienne la route, pour ensuite trouver les financements pour investir dans les moules (car impossible de certifier un prototype) et faire face aux gilets jaunes lors du lancement commercial en Jan 2019…. Suivi des grèves, et ensuite du Covid ! Les annulations de commandes de gros distributeurs à l’étranger en plein confinement… les problèmes avec un associé qui ne tenait pas la route… les magasins qui ne jouaient pas le jeu. Il a fallu faire face au manque de stock sans pouvoir trouver les financements pour commander à nouveau. Ce sont 9 années de lutte, 9 années de difficultés à surmonter les unes après les autres, sans jamais rien lâcher et en cherchant en permanence de nouvelles idées et de nouvelles solutions.
Les crises d’angoisse lors du développent du produit lié aux difficultés de répondre aux normes sans compromettre les avantages du produit… le stress de devoir se séparer d’un associé sachant que c’était impossible d’affronter tout cela seule…. Je n’ai pas un seul problème qui m’a marqué mais toute une série ! Un exemple serait le bureau d’étude qui m’a pris 150,000 euros pour développer un produit devant répondre à toutes les normes et qui au bout d’un an était bon pour recommencer à 0. Lorsque j’ai décidé d’arrêter de travailler avec eux pour trouver d’autres solutions, ils m’ont attaqué en justice pour « rupture abusive de contrat ». Heureusement, le tribunal a décidé d’un non-lieu. Mais je reste encore stupéfaite d’une telle démarche sachant qu’ils étaient complètement en tort.
Un autre exemple serait le coup de fil du distributeur américain qui du jour au lendemain, un 11 avril 2020, a décidé d’annuler toutes ses commandes à cause du covid… sachant que le premier container était déjà fabriqué et en cours d’assemblage et que j’avais du investir en outillages pour adapter la Limo aux normes américaines et repasser des certifications. Heureusement j’avais demandé un acompte de 30% à la commande et donc ils n’ont pas pu tout annuler.
Zoom sur la journée d’une CEO, qu’avez-vous fait hier ?
Mes journées se succèdent mais ne se ressemblent pas. Hier j’ai eu plusieurs calls et une interview chez Magicmaman. Aujourd’hui, j’enchaîne les calls avec des partenaires et prospects. Je gère les commandes, je m’occupe des réseaux sociaux, et je traite mes mails au fur et à mesure de la journée…. En notant que j’ai un énorme retard sur ma comptabilité… et que je dois rapidement décider de quelles seront les prochaines étapes pour structurer au mieux.
Vous avez récemment participé à QVEMA et levé 150 000 euros contre 25% du capital auprès d’Eric Larchévêque, pouvez-nous nous raconter les coulisses de l’émission et les moments marquants ?
Cela faisait 3 ans que j’essayais de participer à QVEMA car j’avais un besoin urgent de fonds. L’émission a été un tremplin énorme, déjà en terme de notoriété et surtout de crédibilité. Les journalistes qui m’ont suivi pendant plusieurs mois pour que mon dossier passe et soit valider par la production et la chaine, ont été d’une aide incroyable. Je ne les remercierai jamais assez car elles se sont battues pour que ma candidature soit validée ! Sans elle, je ne serai jamais passée. Le jour du tournage, j’étais stressée comme jamais ! Pourtant, j’ai pitché des centaines de fois mon projet devant des investisseurs, des réseaux de BA, des friends and family… mais cette fois, en fin de procédure de sauvegarde, je jouais le tout pour le tout, en étant filmée sans avoir la possibilité de recommencer si jamais je n’étais pas satisfaite de ma prestation. Mes filles étaient là pour me soutenir et malgré un stress énorme, j’étais contente d’avoir pu faire la prestation que je voulais et d’avoir répondu à toutes les questions.
Comment l’avez-vous vécu ?
Jusqu’à la dernière minute j’étais persuadée que personne n’investirait. Les « non » les uns après les autres …. Dans ma tête la seule phrase « c’est pas grave, tu as fais ce que tu voulais, tu as répondu à tout, ca n’est que du positif ! Sois forte, garde la tête haute même si personne n’investit ».
Quels sont les projets pour l’avenir de Vidiamo Stroller ? Avez-vous déjà commencé à sentir un effet QVEMA ?
L’effet QVEMA est encore présent…. Ma prestation a obtenu le plus grand nombre du vues sur le compte instagram de la chaine M6 (toutes émissions confondues), donc les parents continuent de voir et de découvrir la limo. J’ai de nouvelles propositions de distribution et de partenariats qui vont permettre à la limo de se faire connaitre de plus en plus en dehors des frontières. De nombreux projets que je souhaite mettre en place depuis quelques années pourront peut-être voir le jour grâce à cette visibilité énorme. ET surtout, le soutien et les encouragements de milliers de personnes me boostent à continuer à être qui je suis, sans jamais rien lâcher !
Le mot de la fin
Croire en ses rêves c’est essentiel, et se dire que quand les choses vont mal, il y a toujours une solution !!!!!
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