- ACTU BUSINESS TECH
- Florence Palmero
- 13 mars 2024
L’IA va-t-elle sauver ou détruire les médias ?
L’intelligence artificielle est un sujet qui suscite énormément d’intérêt depuis des années mais qui est réellement devenu omniprésent en 2023. L’émergence et surtout la facilité d’utilisation de logiciels d’intelligence artificielle comme ChatGPT pour générer des textes ou Dall-E pour des images ont fasciné, effrayé et enthousiasmé la planète entière.
Plus que jamais, cette innovation a questionné, non seulement pour les opportunités qu’elle apportait mais aussi pour les changements qu’elle allait engendrer. Se demander « Comment l’utiliser au mieux ? » n’a jamais eu autant de sens qu’avec l’IA : car cela a une signification différente dans chaque secteur.
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Lorsque ChatGPT, le chatbot le plus utilisé, a fait son entrée, tous les journalistes se sont demandés ce qu’il adviendrait des métiers dans les médias, si des logiciels qui ont un nombre incalculable de données peuvent eux-mêmes rédiger?
Et si aujourd’hui il semble clair que l’IA vient plus en support qu’en remplacement des journalistes, la question de savoir si l’IA est une aubaine ou un danger pour les médias demeure. Alors quels sont les craintes et les espoirs à avoir ?
L’IA va augmenter l’engagement
Les capacités des IA sont presqu’infinies et ce surtout dans un domaine : l’analyse et le traitement de données. Ainsi, les IA sont capables mieux que quiconque d’identifier des tendances, des schémas et des insights précieux pour créer des histoires toujours plus pertinentes.
Il n’y a rien de mieux qu’un algorithme très puissant pour suivre et analyser les préférences individuelles des utilisateurs et recommander des contenus personnalisés. Cela pourrait améliorer l’expérience utilisateur mais surtout augmenter l’engagement, ce qui est de plus en plus difficile pour les médias au milieu des milliers de sources d’informations auxquelles donnent accès Internet, les réseaux sociaux, les chaînes télévisées en continu…
De cette manière, l’IA permet d’optimiser les stratégies publicitaires en analysant les comportements des utilisateurs pour n’utiliser que les annonces les plus pertinentes et apporter davantage de revenus. On pourrait donc penser que l’IA va sauver les médias de cette injonction de suivre les tendances pour gagner en visibilité et en donnant une plus grande liberté aux rédacteurs. Mais cette manière de produire des contenus cache un réel danger.
La tendance actuelle des médias est déjà à la polarisation et à l’opposition des opinions pour choquer et retenir l’attention des publics. Utiliser des algorithmes pour mettre toujours en avant le même type de contenu aux utilisateurs selon leur profil ne fait qu’amplifier les biais qui existent sans refléter la diversité des perspectives. Cela contribue à renforcer les divisions et peut même mener à une forme de manipulation. En effet, diffuser certains contenus selon des critères de données personnelles est une manière de dicter certains intérêts voire certains agendas politiques par le biais de publicités.
L’IA et la déshumanisation
L’automatisation croissante de la production de contenu suscite des inquiétudes. Mais c’est un gain de temps certain pour les sites web qui n’ont plus besoin de consacrer des heures à écrire des articles pour être mieux référencés et améliorer leur stratégie SEO. Cette évolution libère les équipes de la rédaction, leur permettant de se concentrer sur des aspects plus stratégiques de leur métier.
Cependant, cela mène forcément à une perte d’emploi pour les nombreux rédacteurs notamment freelance qui étaient auparavant chargés de produire régulièrement du contenu pour ces sites.
En outre, une dépendance excessive à l’IA pour la rédaction de contenu peut conduire à une déshumanisation de l’expérience utilisateur. Lorsque le contenu est entièrement rédigé par des IA ayant analysé des données personnelles, les articles deviennent impersonnels. Mais les interactions du métier aussi puisque certaines entreprises utilisent déjà des chatbots pour répondre aux clients.
Cette déshumanisation menace non seulement l’authenticité des échanges entre les médias et leur public, mais aussi la capacité des médias à comprendre et à répondre aux préoccupations réelles de leur audience. Et utilisée à outrance, l’utilisation de l’IA pourrait entraîner une perte de contrôle éditorial sur le contenu publié, compromettant ainsi la qualité du média. Il est donc crucial de trouver un équilibre entre l’efficacité que procure l’IA et le maintien d’une expérience utilisateur authentique et éthique.
L’IA et la désinformation
Si vous avez déjà utilisé ChatGPT, vous savez qu’un prompt mal écrit peut vite entraîner une réponse totalement incorrecte. Alors, comment ne pas penser aux fausses informations que risquent de propager les médias utilisant l’IA ?
Les systèmes d’IA peuvent même être utilisés pour créer et propager de fausses informations de manière automatisée. Cette utilisation sapera davantage la confiance du public dans les médias, créant un environnement où la vérité est de plus en plus difficile à distinguer des mensonges. Nous le voyons déjà, les mauvaises utilisations de l’IA pour créer des images ou des contenus audios réalistes réduisent notre confiance en Internet.
Mais l’IA offre certaines solutions en permettant la détection précoce. Les outils d’IA peuvent analyser les modèles de propagation, les sources d’information et les caractéristiques du langage pour repérer les éléments suspects, renforçant ainsi la crédibilité des médias.
L’IA et les inégalités
Une des très belle chose qu’a apportée l’IA est l’accessibilité des médias. Grâce à des outils comme la transcription automatique des contenus audio et vidéo, les personnes malentendantes ou porteuses de handicaps peuvent désormais accéder plus facilement aux informations diffusées par les médias. Elle permet donc de réduire les inégalités d’accès aux médias.
Mais comme souvent, l’automatisation des tâches par l’IA, notamment la rédaction automatique d’articles, pourrait entraîner une perte d’emplois dans le secteur des médias. Et ce ne seront pas les emplois les plus élevés qui en pâtiront en premier. Le secteur des médias étant déjà très inégalitaire en terme de rémunération, les simples rédacteurs débutants risquent d’être de moins en moins considérés.
Conclusion
Il semble évident que l’IA a énormément à apporter au secteur des médias qui évolue chaque jour au rythme des avancées technologiques. Mais pour savoir si l’IA va sauver ou détruire les médias, il faudra attendre de voir l’utilisation qui en sera faite. Aujourd’hui, les scandales autour des deepfakes montrent que l’IA peut vite tourner au cauchemar et créer de toutes pièces de fausses sources. Mais cet outil a une montagne de possibilités et utilisé correctement, il peut aussi venir corriger les problèmes que le journalisme et les réseaux rencontrent au quotidien.
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