
- ALTERNANCE ENQUÊTES
Lou Adam de Beaumais
- 10 mars 2025
Apprentissage en 2025 : vers une crise majeure face aux réformes de l’État ?
L’année 2025 s’annonce difficile pour l’apprentissage en France en raison d’une réduction significative des aides de l’État. Les contrats signés après le 1er mars dans les entreprises de plus de 10 salariés sont directement impactés, avec une diminution de l’exonération des cotisations sociales et l’application de la CSG et de la CRDS.
Concrètement, un apprenti rémunéré au SMIC verra son salaire net baisser d’environ 146 euros par mois, passant de 1 422 à 1 276 euros. Cette évolution a des répercussions sur le marché du travail, les entreprises étant moins enclines à proposer des contrats d’apprentissage.
Dans ce contexte, Indeed, première plateforme mondiale de matching et de recrutement, analyse ces changements et leurs impacts dans sa dernière étude.
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Offres en alternance : un net ralentissement
Le seuil du 1er mars a eu un impact considérable sur le marché de l’emploi en France. Bien que l’apprentissage reste apprécié des recruteurs, le nombre d’offres d’alternance observé en ce début d’année 2025 est nettement inférieur à celui des dernières années. Il atteint même un niveau à peine supérieur aux creux enregistrés durant la pandémie en 2020 et 2021.
L’alternance jouait pourtant un rôle clé dans la réduction des pénuries de compétences. Selon la Dares, 842 800 contrats d’apprentissage ont été signés entre janvier et novembre 2024, soit une hausse de 2,4 % par rapport à 2023.
Cependant, en 2024, le volume des offres d’apprentissage a atteint son pic plus tôt que d’habitude, en avril au lieu de juin. À partir de cette période, il est passé en dessous des niveaux de 2023 et 2022. Quant aux chiffres de 2025, ils s’annoncent bien inférieurs aux deux années précédentes, se situant même sous les niveaux de 2022. Cette tendance laisse présager une baisse continue des offres d’alternance dans les mois à venir.
L’alternance reste un choix privilégié dans les médias, la communication et le juridique
Malgré un ralentissement global du nombre de contrats d’apprentissage, certains secteurs continuent de se démarquer par une forte présence de l’alternance. Parmi eux, on retrouve :
- La vente, la prospection commerciale et le commerce de détail, qui représentent 21 % des contrats d’apprentissage.
- Le management et la restauration, qui comptabilisent environ 6 % des contrats signés.
Depuis 2020, l’apprentissage a connu une forte progression dans certains domaines, notamment les médias, la communication, le marketing et les services juridiques. Dans le secteur des médias et de la communication, le nombre d’annonces en alternance a été multiplié par 4, tandis que dans le transport routier, il a été multiplié par 20.
Plusieurs facteurs expliquent cette tendance : les pénuries de main-d’œuvre dans certains métiers, le coût réduit d’un apprenti pour les entreprises, ainsi que la diminution de la demande pour d’autres types de contrats, comme le CDI, le CDD ou l’intérim. Ces éléments ont contribué à renforcer la part de l’alternance dans ces secteurs en quête de nouveaux talents.
Malgré la baisse des offres, la demande en alternance reste forte
Alors que le nombre d’offres d’alternance diminue, l’intérêt des candidats, lui, ne faiblit pas. Début 2025, la demande pour l’apprentissage est restée quasiment stable par rapport à 2024. En février, les recherches liées à l’alternance et à l’apprentissage représentaient 1,9 % de l’ensemble des recherches sur Indeed, contre 2,0 % un an plus tôt.
Si cette tendance se confirme dans les mois à venir, un paradoxe préoccupant pourrait émerger : l’apprentissage, considéré comme une voie privilégiée d’insertion professionnelle pour les jeunes ( notamment face aux exigences élevées d’expérience pour de nombreux CDI et CDD ) pourrait devenir moins accessible en raison de la diminution des opportunités.
Ce déséquilibre risque d’entraîner un décalage croissant entre les attentes des employeurs et le profil des candidats, laissant de nombreux jeunes sans solution viable pour accéder au marché du travail. Face à cette situation, les écoles et centres de formation ont un rôle clé à jouer. Il devient essentiel de renforcer l’accompagnement des étudiants dans leur recherche d’alternance, de les sensibiliser aux besoins du marché et d’adapter les cursus pour mieux répondre aux attentes des entreprises.
En parallèle, il est crucial d’encourager l’apprentissage dans des secteurs en croissance ou confrontés à une pénurie de main-d’œuvre, comme le numérique, l’industrie ou la santé. Cette approche permettrait de diversifier les opportunités et d’ouvrir de nouvelles voies d’insertion professionnelle pour les jeunes.
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