Interview de Santiago Lefebvre, fondateur de ChangeNOW

Dans cet article, vous découvrirez le parcours de Santiago Lefebvre, fondateur de ChangeNOW. Un homme qui a toujours eu le désir de créer et d’apprendre. 

Pouvez-vous vous présenter ?




J’ai grandi dans un petit village de campagne, entre Paris et Orléans. Les grandes écoles étaient inconnues dans ma famille. C’est mon professeur d’économie en terminale qui m’a parlé des prépas et des grandes écoles.


Enfant, la scène m’attirait particulièrement, que ce soit à travers la musique, la magie ou encore la danse. Mais ma passion première, c’était d’apprendre. J’avais soif de connaissances et ça ne m’a jamais quitté.


Par ailleurs, j’étais animé par un désir incessant de créer. Que ce soit des histoires captivantes, des entreprises, des associations ou encore des aventures collectives, j’ai toujours voulu contribuer au changement et améliorer le monde qui m’entourait. J’ai commencé à l’échelle de mon quartier et de mon entourage.

Aujourd’hui, c’est cette vocation à avoir un impact positif sur le monde et à laisser une trace bénéfique qui continue de m’animer.



Vous avez fait un Msc à emlyon BS de 2003 à 2007. Que vous a apporté votre vie associative dans votre vie professionnelle passée, mais surtout actuelle avec l’écologie ? 

Les écoles regorgent d’associations étudiantes qui permettent de beaucoup apprendre. Lors de mes études, j’ai occupé le poste de président de la Junior Entreprise (JE) de l’emlyon. Cette expérience s’est révélée extrêmement enrichissante, puisqu’elle m’a permis de créer un lien avec le monde de l’entreprise.
 Nous avons mené des missions et audits similaires à ceux réalisés en entreprise et notre JE a rapidement grimpé dans le classement national, pour entrer parmi les quatre meilleures junior entreprises d’écoles d’ingénieurs et de commerce.



Ces expériences ont joué un rôle important dans mon développement professionnel et personnel. Elles ont été le catalyseur d’un processus de leadership, m’apprenant à porter un projet et sa vision, à convaincre des personnes plus âgées que moi, et à bâtir un management inclusif, qui embarque en prenant compte des intérêts de parties prenantes diversifiées.




Est-ce que les étudiants étaient sensibilisés à l’écologie à l’époque ?


À cette époque, les questions écologiques et environnementales n’étaient pas encore vraiment à l’ordre du jour. En regardant le monde tel qu’il était à l’époque, ou encore il y a sept ans quand j’ai commencé à travailler sur ChangeNOW, on constate que de nombreux changements se sont produits.

Mon intérêt pour l’écologie remonte pour ma part à mon enfance. Je me préoccupais déjà beaucoup du bien-être des animaux. J’avais même pour projet de créer des réserves naturelles.


Mais nous faisons tous souvent face à des préoccupations très pragmatiques, comme gagner sa vie. Dans mon cas, il s’agissait aussi de m’extraire de mon milieu d’origine qui était très modeste.



Quatre années de votre expérience professionnelle étaient dans le domaine bancaire, quel est votre regard sur la prise en compte des enjeux sociaux et écologiques des banques ?




À l’époque où je travaillais dans le secteur bancaire, les Accords de Paris n’avaient pas encore été signés et la finance verte n’était pas un sujet d’actualité.


Cette expérience n’en reste pas moins très formatrice, tant sur le plan humain que technique. J’ai été amené à travailler sur des zones touchées par des crises économiques majeures, comme la Grèce, la Pologne ou l’Ukraine. Les discussions avec les acteurs locaux m’ont alors permis de mieux comprendre les réalités du terrain, ainsi que les dynamiques économiques et diplomatiques internationales.

Bien que cette expérience ait été enrichissante, elle ne correspondait pas à mes aspirations futures.


Aujourd’hui, les banques jouent un rôle central dans l’économie et, par conséquent, dans sa transition sociale et écologique. Elles sont des acteurs clés, tout comme l’économie qu’elles financent. Les deux sont indissociables. Les banques doivent réduire l’empreinte carbone de leurs portefeuilles clients, tandis que l’économie doit évoluer en parallèle.

La finance, à l’instar de nombreux secteurs, est un domaine en pleine effervescence, traversé par de nombreux débats et mouvements. Les changements s’opèrent par itérations, à travers différentes générations. Cela peut parfois sembler frustrant, mais il est indéniable que des progrès sont réalisés.

Lire plus : Un étudiant quitte CentraleSupelec pour des raisons écologiques

À partir de 2010, votre carrière prend un tournant entrepreneurial, avec la création de deux entreprises, pourquoi avez-vous décidé d’entreprendre ? Qu’est-ce qui vous plaît dans ce domaine ?




Je tiens à préciser que je n’ai créé qu’une seule entité en 2010. Mais c’est vrai que j’ai toujours grandi avec un tempérament d’entrepreneur. La vie est une aventure que l’on entreprend, une aventure où l’on a la capacité de créer des projets. Donc à ce moment de mon parcours, après 3 ans en banque, j’avais besoin d’exprimer ma créativité, de créer de la valeur, de porter une vision et un projet.
 C’est une aspiration qui me suit depuis longtemps. Déjà en terminale, je rêvais de créer ma première start-up.




En 2016, vous créez ChangeNOW. Expliquez-nous concrètement ce que fait ChangeNow et les raisons pour lesquelles vous avez créé cette entreprise ?




L’idée est née en 2015, juste avant la COP21 et après mon MBA à l’INSEAD, où j’avais créé les TEDxINSEAD. À cette époque, je fais la connaissance des premiers entrepreneurs qui œuvraient pour dépolluer les océans, pour venir en aide aux réfugiés ou pour développer des formes innovantes d’énergie solaire.

Cela a ravivé ma flamme d’entrepreneur et je me suis dit que c’était exactement le genre d’entrepreneur que je voulais être. Cela correspondait à toutes mes aspirations d’enfance. En même temps, j’ai réalisé que je ne savais pas encore où trouver mes pairs, des sources de financement et des soutiens pour mon entreprise. C’est comme cela que j’ai eu l’idée de créer un événement majeur pour rassembler tout le monde et aider à faire émerger des solutions.

Il fallait créer le plus grand événement mondial des acteurs de l’impact pour véritablement accélérer toute une filière, ce que ChangeNOW est devenu 3 ans plus tard.


Que se passe-t-il pendant ces trois jours ? Nous mettons en relation les solutions et les différentes parties prenantes de la transition écologique et sociale pour avancer concrètement sur le comment. Comment atteindre nos objectifs de création d’un monde plus durable et plus humain.

5 ans plus tard, vous lancez en 2021 le classement ChangeNOW / Les Echos Start sur la transition écologique et sociale des écoles, pourquoi et quel est l’objectif à long-terme ?



L’origine duclassement remonte à l’organisation de la deuxième édition du sommet ChangeNOW. J’ai alors été invité à intervenir en ouverture de la COP1 étudiante qui rassemble les étudiants autour de la question écologique. J’ai posé la question : « qui, ici, a peur de l’avenir ? » Je m’attendais à quelques mains levées, mais près de 80% de l’assemblée a levé la main. Cela m’a interpellé et m’a fait prendre conscience qu’il y avait un véritable problème de fond. Toutes ces personnes étaient conscientes des enjeux auxquels elles allaient devoir faire face et ressentaient le sentiment de ne pas y être préparées. J’ai donc réfléchi à une solution pour faire bouger les lignes. C’est ainsi qu’est né le classement.

Cet outil offre aux étudiants une grille de lecture intégrant les dimensions écologiques et sociales pour leur permettre de faire leur choix d’établissement en toute connaissance de cause. Nous avons travaillé avec Les Echos Start, Deloitte pour créer ce classement. L’objectif est d’accélérer la transition des établissements vers des cursus qui préparent mieux aux enjeux de demain.

C’est pourquoi nous intégrons à la fois des aspects de compréhension du système environnemental et climatique, mais aussi une grande ouverture sur les questions de diversité, car apprendre à vivre dans un monde diversifié nous aide justement à mieux naviguer dans le monde de demain.

Lire plus : Classement ChangeNOW – Les Echos START 2023 : Palmarès des Grandes Ecoles les plus engagées !

Aujourd’hui, cela fait 7 ans que vous êtes à la tête de ChangeNOW, quelles sont vos missions au quotidien en tant que PDG ?

Quel est mon job en tant que CEO de ChangeNOW après sept ans d’existence de notre structure ? C’est une bonne question. 

Mes journées s’articulent à présent autour de trois volets : 


• La gestion organisationnelle. 
Je consacre un tiers de mon temps à la direction opérationnelle de l’entreprise, englobant la gestion des équipes, les aspects administratifs, le reporting, et la définition de la stratégie.

• Le Contenu / Éditorial, écosystème, expérience utilisateur. 
Une autre portion significative de mon temps est allouée à l’élaboration du contenu éditorial et à la conception des événements, en collaboration étroite avec mon équipe. Dans ce cadre, je revêts les casquettes de rédacteur en chef et de directeur artistique, veillant à ce que notre message soit clair et percutant, et que l’expérience utilisateur soit à la hauteur de nos ambitions.


• Le développement de nouveaux projets et de l’influence
. Le reste de mon temps est dédié à l’expansion de l’influence de ChangeNOW, à travers le développement de nouveaux projets tels que le classement des écoles et la préparation de futurs sommets, dont entre autres, l’édition 2024 du World Living Soils Forum, un nouvel événement dédié à l’agriculture régénératrice.



Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans l’impact ? Quelle est votre vision sur ces sujets et les enjeux qui en découlent ?



Le domaine de l’impact social et environnemental est captivant, car il nous offre la possibilité de façonner le monde de demain et de redéfinir notre rapport à lui.

 Nous sommes actuellement à un carrefour qui s’apparente à un changement de civilisation. Chacun d’entre nous contribue, à sa mesure, à l’édification d’une civilisation plus durable et plus humaine. C’est comme si nous participions à une nouvelle Renaissance, façonnant et réinventant les fondements de notre société pour les siècles à venir.



Quels sont les projets de ChangeNOW à moyen et long-terme ?



Notre ambition est d’avoir un impact durable et significatif à travers l’ensemble de nos initiatives tout au long de l’année, en faisant progresser certains sujets et secteurs dans leur globalité. Cela implique le déploiement de nouveaux événements qui viendront compléter notre sommet annuel, et qui serviront de leviers pour mettre en œuvre de véritables programmes de changement et d’influence.

Avez-vous des anecdotes à nous raconter sur vos aventures entrepreneuriales ?



Les aventures entrepreneuriales sont souvent jalonnées d’anecdotes et de moments clés, parfois difficiles, qui nous poussent à nous dépasser. Pour ChangeNOW, il y a eu plusieurs moments où tout semblait s’arrêter, puis soudainement, une bonne nouvelle arrivait et remettait le projet sur les rails.


Je me souviens particulièrement d’un moment, quatre mois avant le premier événement. Tout était prêt, le contenu, le lieu, mais nous n’avions pas un centime de financement. Nous avions rendez-vous avec une spécialiste de l’organisation d’événements qui, après nous avoir écoutés, nous a simplement conseillé d’arrêter et de repousser l’événement, affirmant que nous n’y arriverions jamais. En sortant de ce rendez-vous, je me suis tourné vers mon associée, Rose-May Lucotte, et je lui ai dit : « Mais, elle n’a rien compris ! On a le vent dans les voiles ! On va y arriver. Ce projet va sortir ». C’était presque irrationnel, mais c’est aussi ça l’aventure entrepreneuriale : avoir la conviction profonde que ce que l’on fait a un sens, même quand tout le monde vous dit exactement le contraire.


Bien sûr, il est également crucial de savoir reconnaître lorsque nous faisons erreur, tout comme il est important de discerner lorsque ce sont les autres qui se trompent.

Un mot de la fin pour les étudiants ?




Si je devais partager un conseil avec les étudiants, ce serait de ne pas avoir peur d’essayer. La vie est une succession d’expériences et c’est en multipliant les expériences que l’on apprend et que l’on grandit. Je suis un passionné de biographies et j’ai souvent remarqué que les vies les plus passionnantes commencent par un choix : celui de tester, d’expérimenter. Alors n’hésitez pas, lancez-vous ! Ce n’est pas grave d’échouer, de changer de cap. Ces expériences vous enrichiront et vous feront grandir plus vite. Alors n’ayez pas peur, testez et vivez une vie riche en expériences !

Lire plus : Rencontre avec Marianne Josselin – Innovators and Exhibitors Manager chez ChangeNOW