De trader chez Goldman Sachs à Streamer : découvrez l’incroyable parcours de Marc Lesage-Moretti
Dans cet article, découvrez le témoignage de Marc Lesage-Moretti alias Jokariz, ancien Vice-Président Cross Asset chez Goldman Sachs devenu streamer sur Twitch.
Peux-tu te présenter et nous parler de ton parcours ?
Je m’appelle Marc Lesage-Moretti, j’ai 31 ans et après avoir passé 7 ans en Cross Asset Sales chez Goldman Sachs, j’ai décidé de me lancer en tant que streamer sur Twitch.
J’ai tout d’abord effectué une classe prépa ECS au lycée Saint Jean De Passy à Paris. Puis, à l’issue de mes deux années en classe préparatoire, j’ai intégré l’ESCP en 2011.
En parallèle de mes études, j’étais beaucoup investi dans le foot. Le concept d’avoir les jeudis après-midi de libre pour toutes les écoles afin de pouvoir faire les compétitions inters-écoles et ce principe de rivalité entre chaque équipe était très cool.
Toutefois, mis à part le foot, je n’étais pas vraiment impliqué dans le monde associatif. J’ai eu très tôt ce besoin de travailler pour commencer à me débrouiller par moi-même. Et donc cela m’a pris beaucoup de temps. Dès ma première année, j’ai commencé à donner des cours en tant que Professeur de Mathématiques à deux classes d’une quinzaine d’élèves chez Optimal Prépa.
À la fin de ma première année, en 2012 donc, je décide d’échanger mes 3/4 mois de vacances contre un stage en Private Equity au sein d’Impact Partenaires, une structure dont le but est d’investir dans des projets à impact social. Ce stage a été pour moi la première étape pour obtenir de nouvelles opportunités pour d’autres stages futurs en finance.
En 2013, je décide de faire un semestre sur le campus de l’ESCP à Londres, tout d’abord pour améliorer mon niveau d’anglais, mais aussi pour découvrir de nouveaux cours, notamment en finance de marché. À cette même période, je vois passer un message d’une RH de la BNP Paribas disant qu’elle viendrait sur le campus de l’ESCP à Paris pour faire passer des tests de logique et de finance pour un stage en produits structurés. Malheureusement, ces tests n’étaient destinés qu’aux étudiants de Supélec, en double diplôme avec l’ESCP Paris. J’étais assez déçu, car ça m’intéressait vraiment. J’ai donc écrit à la RH pour lui montrer ma motivation et ma détermination à passer ces tests, mais elle a quand même refusé. Mais étant de passage à Grenoble pour un événement étudiant, je me suis dit que je n’avais rien à perdre à faire un détour à Paris avant de rentrer à Londres pour tenter de passer ces tests. Assez surprise de ma venue, la RH m’a finalement laissé passer ces tests. Cela m’a permis par la suite de passer assez difficilement, mais avec succès les entretiens, ce qui m’a valu d’être le premier stagiaire structureur d’école de commerce chez BNP Paribas.
En 2014, à la fin de cette année de césure, nous avions pour projet avec un ami qui faisait partie de ma colocation à Londres, de refaire une colocation ensemble. Après avoir regardé les campus dans lesquels il y avait le plus de places, nous avons postulé pour l’échange avec University Of Illinois Urbana-Champaign. Après avoir été pris tous les deux, nous avons fait nos valises pour décoller en direction des États-Unis. En ce qui concerne les cours, ils n’étaient pas très intéressants étant donné que nous avions uniquement accès à des cours d’étudiants en Bac +3. Toutefois, cet échange m’a permis de voyager à travers les États-Unis et d’être capitaine de l’équipe de foot des International Students.
Lors de mon échange aux États-Unis, j’en ai profité pour candidater pour les Summer. Après n’avoir eu que des refus, je décide de rentrer à l’ESCP pour me spécialiser en finance de marché lors de mon dernier semestre de dernière année. Il se trouve que le cours était très bien fait et que la directrice de la spécialisation était très forte. De plus, elle avait un gros réseau d’anciens étudiants en finance et en profitait pour mettre en contact ses étudiants avec les anciens. Moi, j’ai été identifié comme celui qui était bon en produits structurés (car j’en ai fait chez BNP Paribas pendant 10 mois), et la directrice m’a recommandé à Goldman Sachs qui recherchait un stagiaire en produit structuré. Ce qu’il est important de savoir est qu’une recommandation permet uniquement de permettre à ton CV d’arriver aux opérationnels, mais tout reste à faire. À l’issue donc de 7 entretiens de recrutement, j’ai été pris pour un stage de 6 mois à Goldman Sachs. Suite à ce stage, je passe 20 entretiens pour finalement être pris en CDI au sein de cette même banque.
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Qu’est-ce qui t’a amené vers la finance de marché ? Pourquoi ce choix ?
Comme j’ai pu l’évoquer précédemment, j’ai effectué un stage en Private Equity lors de ma première année à l’ESCP. Toutefois, je ne trouvais pas que l’aspect mathématique en finance d’entreprise était assez stimulant pour moi, qui suis un grand passionné des maths.
J’avais donc besoin d’un métier dans lequel il y avait des maths. Et lorsque j’ai eu mes premiers cours en finance de marché, j’avais l’impression qu’il y avait vraiment ce côté mathématique. Puis, lorsque j’ai effectué ma césure à Londres, j’avais un colocataire de Centrale Paris qui était très fort en maths et en finance de marché. Il m’a donc un peu coaché sur la finance de marché et j’ai vraiment apprécié.
Comment as-tu vécu tes stages ?
Je dirais que c’est monté crescendo. Lors de mon premier stage en Private Equity, ça s’est super bien passé, c’était une petite structure très cool et je me suis très bien entendu avec toute l’équipe.
Ensuite, mon stage à la BNP Paribas s’est aussi vraiment bien passé. J’ai dû pas mal travailler, mais c’était hyper formateur. Généralement, les banques françaises possèdent une importante quantité de stagiaires, qui n’embaucheront pour la plupart jamais, mais ils les forment super bien.
Pour les banques américaines, c’est différent. Ils prennent assez peu de stagiaires et ne les forment que très peu, mais il y a une vraie probabilité d’embauche derrière. Le stage en banque américaine est plus vécu comme un test pour voir si tu peux être embauché. Et donc le stage chez Goldman Sachs a été extrêmement dur, je n’ai jamais autant travaillé de ma vie.
Peux-tu nous expliquer ton évolution et tes missions pendant ces 7 années chez Goldman Sachs ?
Je commence les trois premières années en tant qu’Analyste. C’est la période durant laquelle nous devons un peu travailler pour tout le monde et absorber beaucoup de choses en même temps et ça a été très formateur.
J’ai ensuite été promu au poste d’Associate ce qui m’a permis d’être responsable de mes propres clients. Ce que j’ai aimé en tant qu’Associate c’était le développement des relations commerciales. J’ai pu rencontrer des clients et comprendre leurs attentes, et leurs besoins pour ensuite être le chef d’orchestre en interne sur le plan d’action à élaborer pour créer du business.
Après avoir fait 3 ans en tant qu’Associate, je suis passé Vice-Président. C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte que je n’étais plus trop challengé intellectuellement et qu’il y avait des décisions un peu trop politiques en interne qui me déplaisaient.
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Peux-tu nous expliquer comment tu as décidé de quitter le monde de la finance pour devenir un streamer sur Twitch ?
Après avoir donc été promu Vice-Président chez Goldman Sachs, les missions que je devais effectuer ne me challengeaient plus intellectuellement. Puis j’avais l’impression d’être le seul passionné. Je ne voyais aucune personne autour de moi qui était là parce qu’elle adorait les maths, les produits dérivés et parce qu’elle avait l’impression que les probabilités financières étaient des maths poussées à l’extrême qui permettaient presque de prédire l’avenir. J’étais un peu le seul dans ce délire. Finalement, le fait que je ne vois aucun manager qui puisse m’inspirer et dans lequel je puisse m’identifier, m’a réellement questionné sur ce que j’allais faire de la suite de ma vie professionnelle.
Et, à cette même période, je me suis intéressé de plus en plus à League of Legends. La creator economy également m’intéressait beaucoup. De nombreuses choses se sont passées. En septembre 2021, le code source de Twitch a été hacké et tous les salaires des streamers ont été dévoilés. C’est à ce moment-là qu’on comprend que des personnes arrivent à générer des millions d’euros en jouant aux jeux vidéo. Et moi, en 2021, 2022, je me posais vraiment la question de savoir ce que j’allais faire de ma vie. Et devenir streamer devenait une option sérieuse à envisager pour moi, ou en tout cas, faire quelque chose dans la creator economy.
D’ailleurs, d’un point de vue investisseur, des amis à moi de la Sillicon Valley me disaient que ces derniers, lorsqu’ils entendaient les mots creator economy, devenaient dingues et voulaient absolument investir là-dedans. En fait, eux voyaient vraiment la creator economy comme une révolution économique énorme. Et donc, se lancer dans ce monde était très réfléchi. Dans tous les cas, je savais que cette expérience allait me faire apprendre plein de choses sur la creator economy.
Ensuite, si nous parlons de l’aspect purement gaming, j’étais niveau Platine sur League Of Legends quelque temps après mes débuts, ce qui correspond au top 15% des joueurs. C’était un très bon niveau déjà, toutefois beaucoup de personnes ont une mauvaise image de ce genre de jeux vidéo pensant que ce sont des jeux vidéo imbéciles et abrutissants. Mais en recherchant des vidéos au sujet de League Of Legends, je me rends compte que c’est beaucoup plus complexe que ce que les gens pensent. Je me suis donc dit que je voulais prouver à la fois aux personnes qui ne connaissent pas vraiment l’e-sport et qui ne voient que la dimension entertainment/jeux de salon, qu’il peut y avoir de la compétition et un coté extremement challengeant dedans, et à la fois aux jeunes que League Of Legends n’est pas qu’un jeu de mécanique et que même à 31 ans, on est capable, grâce à une compréhension profonde du jeu,de monter à un très haut niveau.
Qu’en ont pensé tes collègues de travail, tes proches ?
Mes proches étaient assez admiratifs de voir à quel point j’avais l’air sûr de moi. Dès que je me concentre sur un projet, j’ai la capacité de montrer à tout le monde que c’est la meilleure voie possible. Puis, j’avais tellement réfléchi à ce changement de carrière que mes proches savaient que c’était un projet sérieux et pensé à l’avance.
Lorsque j’ai quitté Goldman Sachs et que j’ai annoncé à mes collègues la raison pour laquelle je partais, leur réponse était assez marrante. Ils avaient tout de suite le réflexe de savoir de combien d’abonnés j’aurais besoin pour gagner autant qu’avant. Pour eux, c’était uniquement une décision qui reposait sur l’argent. Pour eux, si j’ai décidé de devenir streamer, c’était seulement parce que je savais que je pouvais gagner plus qu’en banque. Mais ce n’était pas du tout la raison financière qui m’a poussé à changer de métier.
Comment se sont passés tes débuts en tant que streamer ?
Je décide de me lancer en février 2022 sur Twitch et je fais uniquement du gaming. Je reste niveau platine, car j’essaie de jouer et d’animer à la fois, puis de développer mes réseaux en même temps, donc je fais beaucoup de choses. Mais je n’arrive pas à progresser. Je comprends vite qu’il ne fallait faire qu’une chose à la fois, si tu as deux priorités, c’est que tu n’en as pas. Donc, pour m’améliorer, je rencontre Kazewa, un ancien joueur professionnel qui propose des formations. Je décide en janvier 2023 d’arrêter le stream pour que Kazewa me coach deux fois 2h par semaine. Et, à côté de cela, je jouais 12h par jour, 6 jours par semaine, donc assez intensément.
Pendant les deux premiers mois, je suis resté Platine, puis j’ai eu un déclic et j’ai un peu compris toutes les pièces du puzzle et je suis passé de platine à Master en 3 semaines. Et au moment où je passe Master, je décide de le partager sur LinkedIn, car j’avais déjà acquis une communauté de 1800 personnes. Puis, je vois sur Twitter une personne qui a screenshot mon parcours avec Goldman Sachs et maintenant streamer et qui poste “quelle vie de rêve”. Le post fait plus de 200 000 impressions et une personne l’a retweeté en m’identifiant. Le lendemain, j’ai rédigé un tweet dans lequel je parle de mon parcours, et ce tweet fait plus de 175 000 impressions.
Après avoir vu la hype après la publication de ce post, et après avoir reçu de nombreux messages, je décide de lancer un live le même jour pour répondre à toutes les questions. Je suis passé de 10 viewers, il y a 3 mois à plus de 350 personnes aujourd’hui.
Que fais-tu donc sur Twitch ? Quel contenu souhaites-tu proposer ?
Sur Twitch, je fais actuellement chaque semaine un Talkshow souvent axé sur la finance, mais pas seulement, et un live gaming sur League Of Legends. Je fais aussi fait quelques lives pour parler de mon parcours et répondre aux questions des internautes. Mais j’aspire à me développer sur d’autres sujets. Par exemple, j’aimerais bien faire des lives talk show dans lesquels j’invite des personnes d’horizon completement différents pour parler de leur métier et de leur vie. Puis, sur le côté gaming, j’aimerais pouvoir me développer sur d’autres jeux dans lesquels j’aurais moins besoin d’être focus sur le jeu et dans lesquels je pourrais davantage discuter avec le chat et faire un live interactif. Des jeux comme Hogwarts Legacy ou Zelda qui sont magnifiques visuellement pourraient être bons candidats et donc en termes de divertissement, je pense que ce sera plus sympa à regarder.
Enfin, après avoir fait mes lives twitch, je poste des clips sur Twitter de 4/5 minutes pour expliquer un concept, je post aussi des clips sur Tiktok et je poste la VOD du live chapitrée dans son intégralité ensuite sur Youtube.
Comment arrives-tu à gérer ce nouveau rythme de travail ?
Au tout départ, quand je commence à jouer en parallèle de mon travail chez Goldman Sachs, j’ai peu de temps pour jouer. Surtout en 2020, avec la crise sanitaire, j’ai dû beaucoup travailler et j’avais très peu de temps pour jouer à League Of Legends. Aux alentours de Septembre 2021, je commence à dire à mes supérieurs mon envie de partir de Goldman Sachs, et mon rythme chez Goldman Sachs commence à diminuer. Ce qu’il faut savoir c’est que plus tu montes dans les échelons moins tu travailles en termes d’heures. C’est vrai que je n’avais pas énormément de temps libre non plus pour jouer, mais le peu de temps que j’avais je le consacrais au gaming. Pouvoir jouer sur mon temps libre était la chose qui me motivait, me détendait, me challengeait.
Aujourd’hui, je fais uniquement du stream et mon rythme est effectivement différent. Ce qui est cool, c’est que je n’ai pas d’horaires, mais c’est aussi un risque, car tu peux ne jamais t’arrêter de travailler. Je dois donc vraiment être bien structuré et organisé, car même avec une petite communauté, on est énormément sollicité donc c’est important de pouvoir lâcher prise pour décrocher un peu.
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Quels sont tes objectifs et projets futurs ?
Pour l’instant, je me laisse un an pour monétiser pour éviter d’être ensuite en difficulté. Ce qui est sûr, c’est que je ne reviendrai pas dans la banque. Si je dois faire autre chose que du stream, je ferai quelque chose soit dans la creator economy, soit dans la tech. Un de mes projets parallèle serait également d’intégrer une structure e-sport. Cela me permettrait de garder mon stream, et d’avoir une certaine légitimité dans le milieu du e-sport.
En tout cas, ce que je compte faire pour la suite, c’est créer mon entreprise dans laquelle j’aurai potentiellement plusieurs lignes de revenus dont les abonnés sur Twitch, les revenus Youtube, les partenariats avec les annonceurs, les conférences que je ferai dans les écoles et les entreprises…
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