Une professeure de danse écartée de Sciences Po pour avoir employé les termes « homme » et « femme »

Une professeure de danse écartée de Sciences Po pour avoir employé les termes « homme » et « femme »

L’affaire agite les médias nationaux depuis quelques jours : Valérie P. professeure de danse à Sciences Po Paris depuis plus de 8 ans, quitte l’école pour avoir été accusée de « sexisme » par l’institution. Cette dernière  regrette la position abusive de l’école concernant la théorie du genre, qui irriguerait sa charte de déontologie. Retour sur cette nouvelle affaire qui secoue l’école de la rue Saint Guillaume.

 

 

Le parcours de Valérie P.

La nouvelle ex-professeure de danse de Sciences Po est une grande passionnée de danse. Elle commence à pratiquer la danse de salon après son bac, selon le site midetplus, une discipline qu’elle n’abandonnera plus depuis. Après une maîtrise en sciences économiques à l’université Paris 2, Valérie P. intègre la prestigieuse institution Sciences Po Paris d’où elle sortira diplômée en 1994 du Master ECO FI (aujourd’hui renommé Master Finance & Stratégie). Elle poursuivra par un DEA d’économie appliqué toujours au sein de la même institution. 

En parallèle de ses études à Sciences Po, elle pratique la danse au sein de l’école, très certainement une des raisons pour lesquelles elle souhaitera quelques années plus tard approfondir cette discipline et la diffuser au sein des nouvelles promotions de l’école. 

Après une première expérience dans une entreprise de relations publiques et communication, elle donnera des cours de danse pendant une dizaine d’année au début des années 2000. Dotée de solides bases en économie et en gestion d’entreprise, la diplômée du master ECO FI de Sciences Po ouvrira sa propre école de danse privée « Au salon de Danse », qui enseigne la danse de salon à Paris : samba, cha-cha-cha, rumba, valse… Les enfants comme les plus âgés viennent se former rue Falguière, dans le 15ème arrondissement de Paris. 

En parallèle, Valérie P. partageait sa passion aux plus jeunes en donnant des cours dans son ancienne maison, Sciences Po.

 

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Une professeure de danse écartée de Sciences Po pour « sexisme »

L’affaire éclate dans un contexte de tension sur la théorie du genre, sur laquelle Sciences Po a pris position à travers notamment sa charte de déontologie. L’institution rappelle qu’elle lutte contre toutes formes de discrimination et qu’elle ne laissera passer ni remarques, ni comportements déplacés de la part de ses professeurs et étudiants. Mais que s’est-il réellement passé dans ce cours de danse pour qu’une ancienne de la maison soit amenée à quitter ses fonctions sur une discipline qu’elle apprécie tant partager ? 

Interrogée par CNEWS, Valérie P. assume fièrement sa position et revient sur les faits qui lui ont été reprochés.

La danse enseignée s’exerce en couple, avec un homme et une femme. Ce sont ces termes « homme » et « femme » qui ont posé souci à un étudiant du cours et à Sciences Po. Cette année, sans qu’on n’ait rien communiqué à son enseignante, l’école a changé les inscriptions et a enlevé les termes « homme » et « femme » pour les remplacer par « leader » et « follower ». Les cours de danse étant souvent plus suivis par les femmes que par les hommes, cela a posé souci puisque beaucoup de femmes se sont inscrites en tant que « leader » en pensant que cela signifiait un niveau plus avancé, alors que dans les faits cela signifiait « homme ».

Un déséquilibre numérique a donc été renforcé à cause de cela. Pour résoudre ce problème la professeure demande donc à son groupe de séparer classiquement les femmes d’un côté et les hommes de l’autre pour pouvoir reformer les couples efficacement.

Suite à cela, un étudiant s’est senti discriminé par la manière d’agir, suite à quoi Valérie P. fut contactée par Sciences Po qui lui rappella les règles de bienséance de l’institution et la nécessité de prendre soin de ses étudiants.

L’école finira par demander à son enseignante de se plier à sa charte et de ne plus employer les termes « homme » et « femme » sous peine de renvoi, une demande déclinée par Valérie P.  qui se dresse contre ce « chantage » de l’école. La diplômée 1994 de l’école finira donc par préférer quitter l’institution plutôt que de se plier à une idéologie qu’elle n’accepte pas. 

 

« Je ne pense pas qu’employer les termes homme et femme soit une insulte »

Pour l’avertie, aucune raison toutefois de courber l’échine par rapport à sa manière d’opérer : « Je ne pense pas que ce soit une insulte d’employer les termes homme et femme » rappellera-t-elle aux journalistes de CNEWS.

« En tant qu’ancienne étudiante de Sciences Po, je souris quand je vois que l’école tombe dans le politiquement correct et demande d’employer les termes follower et leader, qui sont des mots empruntés à la langue anglaise. La langue française est une belle langue, je n’accepterai pas cela » a-t-elle déclaré aux mêmes journalistes.

De nombreux étudiants, dont certains ont contacté à cet effet des médias nationaux, ne comprennent pas non plus la position de l’école et apportent leur total soutien à l’ex-enseignante de Sciences Po.

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La danse serait-elle sexiste ?

Mais alors, le problème ne résiderait-il pas tout simplement dans la nature même de la danse de salon qui aurait un aspect discriminant ? Pas du tout selon Valérie P, pour qui « nous avons simplement un homme et une femme unis par le plaisir de danser ensemble. C’est plutôt à partir du moment où on emploie les termes follower/leader qu’on crée une discrimination avec un dominant et un dominé ! ».

Qu’en dit le cadre règlementaire officiel de la discipline ? Comme l’indique l’article 6 du règlement officiel de la Fédération Française de Danse : « Un couple doit être constitué d’un partenaire masculin et d’un partenaire féminin à l’exception de la disposition suivante : Dans toutes les épreuves autres que celles menant aux titres de champion de France (championnats départemental et régional, coupe de France et championnat de France), dans les catégories Juvénile I, Juvénile II, Junior I et Junior II, les couples pourront être constitués de deux filles. »

Et Valérie P. de rappeller sa position contre la théorie du genre : « Une femme a son corps, l’homme a son corps. La théorie du genre veut venir dangereusement brouiller tout cela même dans le domaine de la danse ».

Selon elle, il faut aussi avoir du bon sens. Dans la majorité des cas, les hommes sont effectivement plus volumineux que les femmes, on ne peut pas demander à une femme de soulever son partenaire de 15 cm et 20 kg de plus qu’elle.

 

La position de l’école : « Les discriminations n’auront jamais leur place à Sciences Po »

Dans un communiqué de presse du 08 décembre à destination des étudiants, enseignants et de la presse, Sciences Po évoque une « instrumentalisation politique générée par la démission d’une professeure de danse ». 

L’école affirme que l’enseignante n’en est pas à son coup d’essai en matière de propos déplacés : « Plusieurs étudiants inscrits à un cours de danse, composé de 20 élèves, se sont plaints auprès de l’administration de Sciences Po de propos sexistes, discriminatoires, dégradants et minimisant les violences sexistes et sexuelles, tenus de façon répétée par l’enseignante ».

L’école de la rue Saint Guillaume rappelle également que Valérie P. n’a pas été renvoyée de l’école, mais que la décision de partir fut sienne : « Sciences Po lui a fait part de la nécessité de cesser ses propos à caractère discriminatoire, conformément à la loi et à notre charte de déontologie. Dans ce contexte et contrairement allégations de la presse relayant l’information selon laquelle elle aurait été congédiée de Sciences Po, l’enseignante a indiqué à l’administration de Sciences Po qu’elle ne souhaitait pas poursuivre ses activités au sein de notre institution ».