- CARRIÈRE INTERVIEWS LUXE
- Matthieu Zuili
- 24 janvier 2022
Interview de Floria Migniot – Global Content & DAM Manager chez Hublot
Nous avons interviewé Floria Migniot, alumni de Neoma, actuellement Global Content & DAM Manger chez Hublot, maison horlogère du groupe LVMH.
Bonjour, pouvez-vous nous parler de votre parcours académique et professionnel ?
J’ai effectué mon lycée en sport-étude à Paris donc j’étais tous les matins au lycée Racine et tous les après-midis au Conservatoire supérieur de danse de Paris. Après l’obtention de mon baccalauréat scientifique, je me suis dirigée vers une classe préparatoire HEC à Neuilly après avoir abandonnée l’idée de faire de la danse mon métier. J’ai intégré Neoma (ex- ESC Rouen) et j’ai réalisé un séjour Erasmus à Wuhan en Chine.
Mon parcours professionnel a débuté à mon retour de Chine par un stage chez Repetto, une Maison connue pour ses chaussons et vêtements de danse et ses souliers inspirés de l’univers de la danse. Ils m’ont ensuite embauchée avant même que je ne termine mes études à Neoma. Je suis restée 8 ans chez eux et j’y ai mis en place l’atelier de personnalisation, qui se nomme l’atelier Repetto. Un service haut de gamme qui permet, aujourd’hui encore, de personnaliser ses souliers Repetto. Au sein de cette petite maison à renommée internationale, il fallait faire plusieurs métiers. Moi je m’occupais de la presse, du trade marketing, de l’événementiel, de la relation avec nos distributeurs, … un tas de choses passionnantes. J’ai énormément appris auprès de Jean-Marc Gaucher, CEO de Repetto, qui a su me faire confiance. Ensuite, j’ai quitté Repetto pour suivre mon mari qui a été muté en Suisse. À ce moment-là, j’ai complètement changé de vie : j’ai été professeure de danse pendant une année. Ce métier était l’un de mes rêves d’enfant. Mais le monde de l’entreprise me manquait et le service marketing/communication aussi. Les planètes se sont bien alignées, j’ai été contactée par un chasseur de tête pour un poste de responsable des relations de presse internationale chez Hublot. Cela fait maintenant 3 ans que j’ai intégré cette maison horlogère. J’ai passé 9 mois aux relations de presse en remplacement de congés maternité puis, ils m’ont créé un poste de Marketing Activations Manager. L’objectif était d’apporter plus de structure et une meilleure gestion des projets au sein du marketing. Challenge relevé. Pour ma 3ème mission, je m’occupe désormais du contenu de la maison Hublot, qui est un axe éminemment stratégique en ce moment.
Comment s’est déroulé votre recrutement au sein de Repetto puis au sein de Hublot ?
Pour Repetto, j’étais en Chine au moment où je les ai contactés en leur disant : « Je rentre bientôt à Paris, je cherche un stage en marketing/communication et je pense que mon profil pourrait vous intéresser. Je connais très bien la danse et son univers et je suis actuellement en école Supérieure de Commerce». À mon retour à Paris on s’est rencontrés puis je ne les ai pas lâchés ( appel, visite, etc). Ils ont vu ma motivation et ma détermination à rejoindre leurs équipes et m’ont embauchée pour un stage qui s’est transformé en CDI. L’aventure a duré 8 années superbes.
J’ai été chassée pour le poste chez Hublot. J’étais l’outsider et n’était pas la mieux calibrée pour le poste. Je connaissais bien sûr le métier (les relations presse) mais pas autant que les 2 autres candidates selon mon chasseur de tête (rires). Ce sont plutôt mes soft skills qui ont fait la différence : mon tempérament, ma gestion du stress et de la complexité, mon ouverture et ma diplomatie.
Quel est le quotidien d’un/une Global Content & DAM Manager ?
Revenons tout d’abord sur ce qu’est le DAM. Le DAM est comme une grosse bibliothèque en ligne. Plus que cela, c’est ce qui permet de centraliser tous les assets (photos, vidéos et autres) dans un seul et même endroit pour à la fois faciliter la création de contenu, partager le contenu avec les équipes en interne et le diffuser à l’externe.
Quant au quotidien d’un/une Global Content & DAM Manager, il n’est jamais le même. On essaye d’anticiper au maximum les choses mais Hublot est une maison qui fait beaucoup de lancements et qui produit énormément de nouveautés à l’année contrairement à d’autres marques horlogères. Donc on doit être très organisé pour gérer les aléas des plannings de production et les demandes qui peuvent arriver de toutes parts. Je fais aussi beaucoup de réunions pour que l’information circule, pour que les projets soient les plus synchronisés possibles afin que l’on soit plus efficients au global. L’objectif de tout cela est que notre image de marque soit de plus en plus forte et impactante.
Qu’est-ce qui vous enthousiasme le plus dans ce métier ?
Ce que j’aime le plus, c’est la relation avec mon équipe Content : c’est hyper stimulant de trouver leurs moteurs pour qu’ils donnent le meilleur d’eux-mêmes. Nous avons beaucoup de travail donc mon objectif est de faciliter au maximum les choses, trouver des solutions, structurer notre service tout en travaillant dans la bonne humeur et le partage afin de construire une équipe la plus efficiente possible.
Au Content plus spécifiquement, j’aime la complexité de notre mission. Nous devons conjuguer la rigueur avec l’art : la rigueur de nos plannings de production et la souplesse qu’impose l’art (photos). Notre organisation est carrée, mais la créativité n’est pas linéaire, elle se manage avec des arrondis. On doit composer avec des personnalités et des sensibilités différentes pour chacun de nos prestataires.
… et dans le luxe ?
Nous avons des moyens pour faire les choses différemment. Cela nous offre beaucoup de confort pour innover, pour essayer de se différencier à chaque fois et c’est ça qui est passionnant dans le luxe. Il faut toujours chercher le beau mais au sens vraiment exigeant de la chose.
Est-ce que vous aviez déjà une appétence particulière pour l’horlogerie avant votre recrutement chez Hublot ?
Non pas du tout, je n’y connaissais rien et j’ai découvert un monde passionnant qui mêle tradition et innovation. Les ateliers se trouvent directement chez Hublot donc tous les jours on peut voir les horlogers assembler les composants avec minutie et rigueur. Notre service R&D est aussi à la manufacture et il permet de voir les projets en cours et de se projeter dans l’avenir de l’horlogerie. J’ai beaucoup appris en 3 ans chez Hublot et dans l’horlogerie. C’est captivant car lorsque vous entrez dans ce monde-là, vous entrez dans un nouvel univers avec son vocabulaire, ses codes, ses exigences. Un peu comme dans l’univers de la danse finalement.
Qu’est-ce que cela vous apporte de travailler en Suisse ?
La Suisse n’a rien à voir avec la France. Donc je me sens à l’étranger et au calme mais pas si loin de Paris quand même. Et ici mes journées commencent et se terminent tôt. J’ai un réel équilibre de vie pro/perso ce qui me permet d’être à 100% dans mon job la journée et dédiée à ma famille le soir.
Et dans votre métier actuel, y a-t-il une dimension à l’international, en plus du fait de travailler à l’étranger ?
Oui tous les jours nous travaillons avec nos différents marchés que ce soit la Chine, le Japon, les États-Unis, etc.
Nous les accompagnons dans la création de leur propre contenu afin de répondre aux attentes locales tout en conservant notre ADN pour avoir une image de marque internationale forte et pérenne. Il y a donc beaucoup d’échanges. Que ce soit à travers un stage, un métier, une mission dans son poste, travailler à l’étranger, à l’international ou les 2, cela permet d’apprendre sur les autres et sur soi. D’ailleurs il me semble compliqué et dommage aujourd’hui d’envisager une carrière sans une dimension internationale.
Quels sont selon vous les enjeux du luxe de demain ?
D’un point de vue communication, l’un des enjeux est d’avoir une image de marque la plus pérenne possible, la plus forte pour qu’elle ne fluctue pas en fonction des tendances. Selon moi, elle doit être au-dessus de ça et ne pas tomber dans le piège de la mode. Elle doit aussi avoir une portée culturelle (à travers ses ambassadeurs, ses partenariats, ses prises de paroles, etc) pour nous élever et nous faire rêver aussi.
Après d’un point de vue plus général, le luxe doit répondre aux attentes des nouvelles générations notamment en termes d’écologie (approvisionnement, économies digitales, production locale, etc).
Mais surtout le luxe doit être irréprochable à tous les niveaux : clients, fournisseurs et employés.
Enfin, est-ce que vous auriez des conseils pour les étudiants intéressées par ce secteur ?
Dans le luxe et plus particulièrement l’horlogerie il y a beaucoup de demandes pour peu d’élus surtout dans certains services comme le marketing ou la communication donc je vous conseille de venir avec des projets. L’idéal est toujours de montrer ce que l’on peut apporter à une société, une idée, une analyse qui aurait été faite pendant un mémoire ou une thèse, montrer en quoi vous pouvez apporter votre pierre à l’édifice.
Et selon moi, le luxe s’inspire aujourd’hui de personnalités. Que ce soit à travers vos jobs, vos passions, vos voyages, découvertes, … apportez toujours quelque chose de nouveau, de différent, bref démarquez-vous ! Enfin, je vous invite aussi à rencontrer les diplômés de vos écoles via les associations d’alumni car ils vous prodigueront toujours de bons conseils !