- CARRIÈRE FINANCE INTERVIEWS
- Thomas Basillais
- 16 janvier 2022
L’univers de la finance avec Réda Aboutika, expert d’XTB
Rencontre avec un expert de la plateforme de trading d’XTB, Réda Aboutika, qui nous donne sa vision du monde de la finance.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Réda Aboutika, je suis Chef Analyste au sein de la succursale française du courtier en ligne XTB à Paris. Mon métier consiste principalement à décrypter les marchés et grâce aux analyses quotidiennes, à aider les investisseurs à comprendre les tendances boursières, à définir leurs scénarios d’investissement et à mieux anticiper l’impact de chaque annonce macro-économique sur les cours. XTB est un broker qui a plus de 18 ans d’expérience sur les marchés financiers, et l’un des 5 plus grands courtiers au monde en 2020 avec plus de 389 000 clients. Le groupe est coté en bourse et est actuellement situé dans plus de 15 pays dans le monde. La succursale parisienne, XTB France, a vu le jour en 2010. Elle est placée sous le contrôle de l’AMF et l’ACPR, et les fonds des clients sont déposés sur un compte ségrégué BNP Paribas. XTB a développé sa propre plateforme d’investissement, xStation qui offre aujourd’hui un choix de plus de 5400 instruments financiers.
Quel est le parcours type à suivre pour travailler dans la finance et/ou intégrer une entreprise de finance de marché »
Plusieurs parcours permettent de travailler en finance de marché, traditionnellement nous pouvons distinguer les postes côté vendeur (sell side), et les postes côté acheteur (buy side). Dans ces deux types de postes, on pourra également distinguer le front-office, en première ligne et en contact direct avec le marché, le middle office, qui sera en support du front, et enfin le back-office, plus orienté administratif. Les postes les plus pointus sont plus facilement accessibles à l’issue d’un cursus grandes écoles. Les cursus universitaires axés sur l’économie et la finance ouvriront les portes du middle-office, et le back office sera quant à lui plus accessible en justifiant de connaissances en économie et/ou en finance à travers d’autres formations.
Depuis de nombreuses années, de nouveaux profils sont de plus en plus recherchés en finance de marché, et nous pouvons constater une forte demande de profils de Data analyst ou de Data scientist. Ces postes nécessitent une spécialisation en Big Data, Statistical analysis, Data engineering …
Il faut tout de même garder à l’esprit qu’il sera toujours possible d’acquérir de nouvelles compétences en cours de carrière, comme par exemple en Data Science, pour intégrer une autre branche en finance. Enfin, le stage de fin d’études sera très souvent déterminant pour intégrer le monde de la finance de marché.
Avez-vous un conseil pour tous les étudiants qui souhaiteraient travailler dans la finance de marchés ?
Pour les étudiants qui souhaitent travailler en finance de marché, l’important est d’être au point sur toute l’actualité économique et financière du moment. Les raisons des grandes fluctuations de prix ne doivent pas être inconnues pour vous, surtout lorsqu’il s’agit d’actifs ayant un rapport avec les plus grandes économies du monde. Faire preuve de curiosité au quotidien est aussi indispensable car ce milieu est en constante évolution, et les connaissances requises aujourd’hui ne seront peut-être pas celles nécessaires à l’avenir, dans un contexte de mutation du secteur financier grâce aux nouvelles technologies. Ainsi, il faut éprouver un réel intérêt pour la finance de marchés afin de nourrir cette curiosité qui fera certainement la différence et vous démarquera lors des entretiens pour prétendre à un poste dans ce domaine.
Enfin, il faut essayer de percevoir la finance de marché comme la compréhension du monde économique qui nous entoure, et non comme de simples flux de capitaux qui répondent aux lois de l’offre et de la demande. Ce sont les étudiants avec cette vision qui réussissent le mieux et qui sont épanouis dans leur milieu.
Quel est le mieux pour débuter : trading court terme ou investissement long terme ?
Pour mieux répondre à cette question, il faudrait se pencher sur les compétences à acquérir pour les deux horizons de temps.
L’investissement long terme nécessite une bonne connaissance des fondamentaux, un bon suivi de l’actualité financière, économique et géopolitique, ainsi que des notions de risk management. Pour compléter ces connaissances, l’analyse technique, l’analyse financière des bilans, et des comptes de résultat sont fortement recommandés.
Le trading à court terme peut être profitable en se basant uniquement sur l’analyse technique, cependant, la psychologie joue un rôle crucial dans ce cas. Ainsi, le trading à court terme nécessite de l’entraînement en conditions réelles afin d’apprendre à maîtriser le biais psychologique qui joue un rôle important lorsqu’il s’agit d’intervenir sur une courte durée.
En clair, il est bien plus simple de maîtriser les figures chartistes et les chandeliers japonais grâce aux ressources qui foisonnent sur internet, que d’acquérir les connaissances nécessaires à l’analyse fondamentale, indispensable à l’investissement de long terme. En effet, le temps de formation à l’analyse fondamentale est beaucoup plus conséquent et il est nécessaire d’avoir une certaine expérience pour acquérir la clairvoyance nécessaire permettant de juger du potentiel à long terme d’une valeur selon les changements de la conjoncture économique.
Quels conseils donneriez-vous aux jeunes qui veulent investir ?
Nous pourrions tout d’abord leur conseiller de s’éduquer financièrement avant d’investir leur argent. Le trading et l’investissement en général ne sont pas sans risque, chaque mouvement de marché peut être profitable, à condition de connaître les catalyseurs, le contexte économique, savoir tirer profit des informations financières… L’analyse technique est également à maîtriser. Pour faire ses premiers pas dans ce domaine, il existe des comptes de démonstration chez XTB, qui permettent à l’investisseur de trader sur nos plateformes avec un capital fictif. Cela facilite la prise en main, et permet de développer sa méthode et ses outils d’analyse tout en étant en adéquation avec le contexte macroéconomique.
Ensuite vient l’expérience, car c’est en faisant des erreurs que l’on apprend, il faut oser se lancer, mais préparer son bagage financier dans un premier temps. Pour se lancer le plus efficacement possible il est donc nécessaire d’investir une somme que l’on est prêt à perdre et de considérer les potentielles pertes comme un coût à la formation. Chaque trade perdant sera source de questionnement et permettra au trader débutant d’en tirer des leçons. Enfin, chaque prise de position dans des conditions réelles sera une occasion de travailler la psychologie et de passer outre les erreurs de débutants, c’est-à-dire laisser courir les pertes, et clôturer de manière prématurée les trades gagnants.
Proposez-vous des outils pour aider les investisseurs à analyser les cours et sélectionner leurs actions ? Lesquels ?
Nous proposons de nombreux outils afin de faciliter la prise de décision de nos clients. Tout d’abord, nous mettons à disposition de nombreuses ressources éducatives sur l’analyse technique et les outils nécessaires à son application sur notre plateforme de trading. D’autres outils sont disponibles sur notre plateforme pour compléter l’aspect technique, tel que le “heat map” qui permet d’avoir une vue globale des performances des actions à tout instant. Nous accompagnons également nos clients tout au long de la séance en leur fournissant des analyses fondamentales et techniques préparées par nos équipes d’analystes. Le département recherche propose aussi des rapports trimestriels listant des actions susceptibles de surperformer à moyen terme en se basant sur des critères précis.
Le “scanner actions”, très plébiscité par nos clients, est également un outil incontournable pour sélectionner des actions selon plusieurs critères, que ce soit la capitalisation boursière, les dividendes, les ratios comptables ou le secteur d’activité.
Quels sont les titres les plus en vogue en ce moment chez les investisseurs ?
Depuis quelques semaines, un nouveau thème d’investissement devient de plus en plus en vogue : le metaverse. En effet, les récentes annonces de Mark Zuckerberg quant aux projets de Facebook, renommé Meta, n’a pas laissé de marbre les investisseurs. Depuis lors, les actions liées au Metaverse rencontrent un réel succès et des valeurs telles que Nvidia, indispensable à l’architecture du metaverse, ou Roblox, une plateforme de jeux en ligne, sont désormais très prisées des investisseurs désireux de s’exposer au metaverse sans avoir recours à des crypto-monnaies telles que MANA ou SAND. Les mastodontes technologiques gardent leur attrait auprès des investisseurs particuliers mais les prochaines hausses de taux d’intérêts pourraient changer la donne pour ces valeurs qui seront certainement impactées dans un avenir proche.
Quel est le rapport des Français à la bourse aujourd’hui ?
Depuis 2019, nous pouvons constater un regain d’intérêt des investisseurs français pour le marché actions. La privatisation de la Française des jeux aura été, semble-t-il, un élément déclencheur de ce nouvel engouement. La crise du covid a renforcé cet intérêt et de nombreux investisseurs ont fait leurs premiers pas sur les marchés à ce moment précis. Si traditionnellement les investisseurs français étaient à la recherche de valeurs plus ou moins “sûres”, souvent sources de dividendes, des profils plus spéculatifs ont fait surface, dans le sillage des traders particuliers américains de la communauté reddit. Tous ces éléments ont attiré des investisseurs de plus en plus jeunes, comme le confirme une récente étude de l’AMF, confirmant la venue sur le marché de jeunes investisseurs “plus ouverts au risque”. Selon cette étude, 58% des Français de moins de 25 ans déclarent avoir l’intention de placer en actions à plus ou moins long terme. Un engouement qui devrait donc se renforcer dans les années à venir, avec des profils plus disposés à prendre des risques sur le marché action, mais aussi sur les crypto-monnaies.
Quel a été l’impact de la crise du covid sur les marchés ?
La crise du covid a été une véritable onde de choc pour les marchés boursiers, avec une baisse de plus de 40% de la valeur du CAC 40. Il s’en est suivi la reprise la plus rapide jamais enregistrée et un soutien monétaire sans précédent de la part des Banques Centrales. Cette onde de choc a également été la source d’une situation inédite sur le marché pétrolier : le cours du baril de pétrole sous zéro, à -38$. En effet, les mesures de confinements ont détruit une grande partie de la demande de pétrole, et la guerre des prix lancée par l’Arabie Saoudite en ouvrant les vannes de ses puits de pétrole a accéléré la chute des cours du brut pour aboutir à cette situation que personne n’aurait pu imaginer.
Le covid continue d’impacter les actions et les marchés réagissent dès qu’un nouveau variant menace nos économies. Il en résulte souvent des baisses brutales des cours avec en première ligne les valeurs les plus sensibles aux restrictions sanitaires. Ces baisses sont souvent effacées très rapidement et les indices boursiers se retrouvent très vite aux portes de leurs records historiques. En atteste le S&P500, qui après avoir perdu près de 5% suite aux craintes liées à Omicron, s’est empressé de marquer un nouveau record historique au lendemain des fêtes de noël.
Beaucoup de jeunes français ont déjà investi en crypto-monnaies, est-ce un placement risqué selon vous ?
Le marché des crypto-monnaies est un marché extrêmement volatile. En finance de marché, la volatilité est synonyme de risque, mais également de meilleur rendement. La volatilité du marché des cryptos ne fait pas exception, elle a permis à beaucoup d’investisseurs particuliers de générer des profits considérables, mais elle a également fait perdre de l’argent à certains investisseurs. Le placement est risqué et il existe des alternatives moins risquées pour les investisseurs risquophobes. Cependant, en se tenant au Bitcoin, cette crypto-monnaie, non inflationniste, est une réserve de valeur et il serait injuste de s’en méfier plus que d’autres actifs dont la hausse repose uniquement sur de l’impression monétaire. La forte volatilité de ce marché reste effrayante pour les investisseurs, et l’apparition de nouvelles crypto-monnaies sans réel intérêt, ne répondant à aucun besoin, ne fait que renforcer la dangerosité de ce marché. En somme, il n’est pas pertinent de mettre toutes les crypto-monnaies sur le même pied d’égalité, car après 12 ans d’existence, il apparaît assez clair que le Bitcoin sera prochainement incontournable pour les paiements et que sa valeur ne pourra pas tomber à zéro comme certains le prédisaient, ce qui n’est pas le cas d’autres crypto-monnaies dont l’existence est difficilement justifiable. Par ailleurs, l’Ether ne cesse de voir son importance se renforcer avec le développement de la DeFI (Finance décentralisée), mais aussi des NFTs (Tokens non fongibles), dont l’utilité reste tout de même plus discutable dans certains cas.
Quel est l’avenir de la finance selon vous ?
La finance durable n’a cessé de prendre de l’importance et devrait continuer à croître au cours des prochaines années. L’innovation technologique entraîne pour sa part une mutation du secteur financier et on constate l’émergence de fintech 2.0, offrant de nouveaux services et produits financiers. Les fintech 1.0 et 2.0 améliorent considérablement l’existant à l’aide de la technologie, mais la DeFi (Finance Décentralisée) apporte pour sa part des solutions inédites et devrait continuer à croître au fil des années, voire s’imposer prochainement dans le paysage financier. Ce développement devrait offrir de nouvelles opportunités et sollicitera de nouveaux profils. Cependant, la TradFi (Finance Traditionnelle ou CeFi pour Centralized Finance) ne disparaîtra pas pour autant et ces deux secteurs seront amenés à collaborer de plus en plus. On voit depuis peu apparaître le terme de CeDeFi, désignant la collaboration de ces deux mondes visant à améliorer considérablement les marchés financiers mondiaux.
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